Léon LHERMITTE (Mont-Saint-Père 1844 - Paris 1925)

L’entrée d’un village animé de paysans en Artois

44 x 57 cm

1905
Pastel sur papier marouflé sur toile
Signé en bas à gauche « L. Lhermitte »

Bibliographie :
• Monique Le Pelley Fonteny, Léon Augustin Lhermitte 1844-1925 : catalogue raisonné, Cercle d’art, Paris, 1991, illustré en noir et blanc sous le numéro 508, p. 248, sous le titre « Une route en Artois ».

Provenance :
• Boussod, Valadon & Cie, 21058 ;
• Collection Glaenger ;
• France, collection particulière.

[…] Il y a une étonnante maîtrise dans tout ce qu’il [Lhermitte] fait, excellant surtout dans le modelage,
il satisfait parfaitement à tout ce que l’honnêteté exige.
Vincent Van Gogh

En 1882, l’État français fait l’acquisition de l’œuvre monumentale La Paye des moissonneurs pour le musée du Luxembourg. Loué par la critique, l’artiste, Léon Lhermitte, devient alors une figure incontournable de la peinture contemporaine. Son ami Auguste Rodin lui envoie à cette occasion ses félicitations par une lettre à laquelle l’artiste répond que le sculpteur est du « très petit nombre dont l’appréciation lui est précieuse » . Identifié par la suite comme l’un des représentants majeurs de la peinture paysanne sous la IIIe République, Lhermitte s’attache notamment à illustrer les environs de son village natal, Mont-Saint-Père dans l’Aisne. Inspiré par Corot, l’école de Barbizon et Jules Breton entre autres, l’artiste se déplace régulièrement et dessine abondamment en plein air afin de croquer sur le vif, à l’aide de pastels et de fusains, les paysages de la campagne picarde.
La Révolution de 1848 rejette les sujets mythologiques privilégiés par l’Académie. Dans les années 1850, la population paysanne représente 75% de la population française et se taille naturellement une place majeure au sein des arts dont les principaux sont la peinture et la littérature.

Lhermitte se rapproche de Jules Bastien-Lepage (1848-1884), peintre de plein air, célébré par Zola dans ses Œuvres Complètes (tome 12, pp. 1022-1023. Paris, Cercle du livre précieux, 1969), et bénéficie de son aura. Il développe avec lui son goût « pleinairiste », suivant et étudiant les paysans vaquer à leurs occupations quotidiennes. Le public apprécie dans son œuvre une sincérité qui ne cherche ni à embellir les figures, ni à remodeler les paysages (ill. 1).

Léon Lhermitte est un peintre de la réalité, comme l’était Jean-François Millet (1814-1875). Aussi bien dans ses figures que dans la nature qui l’entoure, l’artiste souhaite avant tout saisir l’instant présent. Pour cela, il privilégie le pastel et le fusain, très en vogue en Angleterre, qui ne nécessitent pas de préparation et permettent de produire instantanément. Son observation directe de la nature dévoile dans notre œuvre une sensation d’une réalité immédiate traduite par la rapidité du trait.

Grâce à l’utilisation du pastel, l’artiste joue avec le grain du papier et crée un effet de fondu apportant ainsi du volume. Notre œuvre présente les caractéristiques d’une œuvre esquissée en plein air puis retravaillée en atelier. Les quatre personnages présents au premier plan sont traités en transparence, jouant avec le fond déjà esquissé, donnant ainsi l’impression que l’œuvre fut pensée en deux temps, une première version traduisant la vie paisible de la campagne et une seconde version animée au premier plan et à l’arrière-plan.
Ses œuvres sont savamment construites, souvent géométrisées comme en témoigne la ligne de fuite tracée par le chemin de terre dans notre œuvre instaurant instantanément une diagonale forte qui ici dynamise la composition.

Exposé par Durand-Ruel à Londres en 1875, célébré par l’opinion publique et par l’État qui acquiert quelques-unes de ses plus belles œuvres tout en lui commandant des décors pour l’Hôtel de Ville et la Sorbonne, Léon Lhermitte est un artiste très apprécié de son temps et se révèle une figure emblématique de la peinture paysanne du XIXe siècle.

M.O

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